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Nous avons vu, dans une récente chronique (http://bit.ly/1AQWufA), que la règle de minimisation des pertes empêche parfois la succession d’un actionnaire décédé d’éliminer complètement l’imposition du gain en capital de ce dernier.Nous avons alors noté que l’une des techniques pour éviter la double imposition en cas de décès d’un actionnaire était d’appliquer la perte en capital de la succession à l’encontre des gains en capital de l’actionnaire décédé.

Même si le gain en capital est ainsi souvent éliminé en totalité, la perte en capital que génère un dividende de liquidation payé à la succession peut n’être reportable qu’en partie à l’encontre du gain en capital du défunt. Cela laisse ainsi un gain en capital imposable dans la dernière déclaration de revenu de l’actionnaire décédé.

Cette situation se produit lorsque le dividende de liquidation provient en bonne partie du compte de dividendes en capital (CDC). Ainsi, un dividende imposable inférieur à la moitié de la perte de la succession génère un gain en capital imposable pour le défunt égal à la différence entre les deux.

Dans le cas d’un actionnaire unique, on choisira évidemment de verser un dividende en capital maximal à la succession, même si un gain en capital résiduel existe entre les mains du défunt, car le taux d’imposition des gains en capital est inférieur à celui des dividendes.

Dans le cas où la société est une société opérante où d’autres actionnaires survivants désirent maintenir l’exploitation d’une entreprise, les choses ne seront pas si automatiques. En effet, dans la planification post mortem, on aura à faire un arbitrage entre l’impôt total à payer et l’ampleur de l’avantage du CDC résiduel disponible à l’actionnaire survivant. L’option «50/50» devient alors souvent le choix utilisé.

Exemple illustré

Afin de comprendre les impacts de cette technique, prenons un exemple illustré dans le tableau détaillé.

Jos et Pierre sont actionnaires à 50 % chacun d’une société, et leurs actions ont les mêmes caractéristiques, soit une juste valeur marchande (JVM) d’1 M$, un produit de base rajusté (PBR) de 500 $ et un capital versé de 500 $.

De plus, des polices d’assurance vie sur leurs têtes ont été souscrites au montant d’1 M$. Le coût de base rajusté (CBR) des polices est de 10 000 $.

Au décès de Jos, le premier des deux à rendre l’âme, le scénario est le suivant.

Après le décès, la société reçoit le capital-décès de 1 M$. Comme le CBR de la police est de 10 000 $, il y a donc la création d’un CDC de 990 000 $ qui pourra éventuellement servir à verser un dividende libre d’impôt à un actionnaire que l’on choisira, dans notre cas, la succession.

Le tableau montre trois scénarios : le premier résulte de l’application des règles grand-père, pour les polices émises avant le 26 avril 1995 notamment, tandis que les deux autres montrent l’encaissement net lorsque les règles de minimisation des pertes s’appliquent avec un choix de dividende CDC différent.

Le deuxième scénario illustre une affectation entière du CDC sur les dividendes reçus par la succession, et le troisième, une affectation de 50 % du CDC possible.

Analysons maintenant en détail quelques éléments.

Impact pour le défunt

Jos est réputé avoir disposé de ses actions immédiatement avant son décès. Cela génère un gain en capital égal à 999 500 $, soit la juste valeur marchande de ses actions de 1 M$ moins leur prix de base rajusté de 500 $. Ce gain en capital sera annulé en tout ou en partie, selon le scénario, par la perte en capital de la succession.

On peut constater que la perte appliquée n’annule pas le gain dans le scénario du milieu à cause des règles de minimisation des pertes, dont le détail des calculs figure dans la section «Réduction de la perte».

Effet sur la succession

Après le décès de Jos, la succession devient actionnaire de la société au même titre que Pierre. Selon la convention entre actionnaires signée par Jos et Pierre, Pierre peut racheter les actions à la succession. Pierre n’«achètera» pas les actions personnellement, mais c’est la société qui annulera les actions de la succession en procédant au rachat.

Ce rachat génère deux choses pour la succession : un dividende et une disposition. Comme nous l’avons vu au cours d’une récente chronique, si rien n’était fait, on assisterait à une double imposition qu’on pourrait annuler, du moins en partie.

La succession rend donc ses actions à la société qui lui fait un chèque de 1 M$, soit la valeur des actions de Jos avant son décès. Pierre reste donc seul actionnaire après ce rachat.

Ce 1 M$ constitue un dividende pour la succession. En fait, c’est un dividende de 999 500 $, car le capital versé est de 500 $. On peut alors choisir d’utiliser le CDC de 990 000 $ nouvellement créé par la police afin de désigner ce dividende non imposable en grande partie.

Des techniques dont je vous ferai grâce doivent être appliquées afin de pouvoir en arriver à un résultat d’un dividende non imposable inférieur au montant du rachat.

Les deux premiers scénarios sont illustrés avec le choix de «vider» le CDC. L’avantage du premier scénario est que les règles de minimisation des pertes ne s’appliquant pas, moins d’impôt est payable. On doit vivre avec…

Regardons maintenant la ligne intitulée «Encaissement après impôts». On voit que le premier scénario donne presque 1 M$ à la succession. Ce qui génère un impôt, dans notre cas, est le CBR de la police d’assurance. En son absence, la totalité du million de dollars aurait été encaissée par la succession.

Le deuxième scénario montre l’impact des règles de minimisation des pertes : près de 125 000 $ de plus à payer en impôt… On a également fait disparaître totalement le CDC pour Pierre. Mais comme l’application de ces règles n’est pas un choix, il nous reste le troisième scénario qui peut nous permettre d’optimiser la situation.

Dans ce dernier scénario, on fait le choix conscient de n’utiliser qu’une partie du CDC pour la succession afin d’en laisser à Pierre pour l’avenir. Bien qu’il soit écrit «50 %», il s’agit d’une approximation. Le pourcentage exact est de 50,48 %, soit 499 750 $ divisé par le CDC disponible de 990 000 $.

Ce montant correspond exactement au point où le dividende imposable est égal au dividende CDC. On arrive rapidement à ce résultat en prenant le dividende réputé (généré par le rachat) et en affectant la moitié de ce montant en dividende en capital (la moitié de 999 500 $). Ce point indique ainsi le CDC maximal qui peut être demandé sans réduire la perte en capital.

Avantage au dernier défunt

L’encaissement net après impôt de la succession dans ce scénario est de 801 177 $, soit 72 567 $ de moins que le scénario du milieu. Cependant, Pierre, l’actionnaire survivant, conserve alors un CDC de 490 250 $ contrairement à un CDC nul dans l’autre cas.

La convention entre actionnaires peut donc tenir compte de cet impôt supplémentaire afin de compenser adéquatement la succession de Jos, notamment par l’intermédiaire d’actions à dividendes discrétionnaires.

Et je n’ai pas parlé d’un élément dont il n’est jamais question… Le «gambling» qui existe par rapport à celui qui décédera le dernier. On peut voir que si Pierre décède une semaine après Jos, sa succession héritera d’une valeur de 2 M$ (moins l’impôt) en plus du capital-décès de 1 M$ de sa police. Trois fois plus que Jos pour une semaine d’écart. Trouvez l’erreur…

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