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Pour se démarquer de ses concurrents, un conseiller devrait miser sur l’optimisation fiscale. La recette pour réduire la facture fiscale d’un client n’est pas unique. Il existe maintes façons de faire « économiser de l’impôt » à vos clients. Mais ces stratégies ne se valent toutefois pas toutes.En fait, l’optimisation fiscale a un objectif : l’enrichissement… du client lui-même ou de ses héritiers. Et plus vos clients sont riches, plus ils peuvent économiser de l’impôt. Voici des éléments qui peuvent contribuer à favoriser cet enrichissement.

L’assurance vie

Le principal outil pouvant enrichir massivement les héritiers est l’assurance vie. Deux éléments sont à l’origine de cette situation.

Le premier est que, en cas de décès prématuré, peu de primes ont été payées, alors qu’une somme importante est versée au bénéficiaire. Un compte dans lequel on aurait épargné le montant de la prime aurait ainsi nécessité un rendement élevé pour donner le même résultat.

Le rendement nécessaire à un tel compte « alternatif » décroît donc avec le temps, mais il est très élevé pendant plusieurs années. Par exemple, si Jean-Guy, un client fortuné de 55 ans, souscrit une assurance vie de 1M$ et qu’il décède après avoir payé seulement trois primes de 50 000 $, on comprend aisément que s’il avait investi ces 150 000 $, le rendement nécessaire aurait été extraordinairement élevé dans notre exemple, 131 % par année… net !

Évidemment, si le client décède à un âge très avancé, il aurait eu intérêt à investir sa prime d’assurance vie au lieu de souscrire une police sur sa tête ou au dernier décès du couple. Même si cette situation s’avère, le désavantage de l’assurance vie sera souvent négligeable. Le risque associé au fait de ne pas souscrire une police est tellement plus grand qu’il n’existe, rationnellement, aucun motif pour ne pas s’engager dans une assurance vie si la personne a une assurabilité ordinaire. Si votre client fait l’objet d’une surprime, la situation peut être moins claire.

Le deuxième élément favorisant l’assurance vie est le fait que cette dernière jouit d’un avantage fiscal important : le capital-décès est payé sans impôt. Si c’est une société par actions qui est bénéficiaire, le coût de base rajusté (CBR) de la police doit être soustrait du capital-décès et ce résultat augmente le compte de dividendes en capital (CDC), ce qui permet le versement d’un dividende libre d’impôt. Les propositions de réformes fiscales avancées par le gouvernement fédéral en juillet pourraient toutefois changer cette situation.

J’aime bien présenter un tableau au client avec, pour chaque âge de décès possible, le rendement (en intérêt ou autre) devant être réalisé dans un compte non enregistré afin de donner le même résultat aux héritiers, de même que la probabilité de survenance du décès selon une table de mortalité reconnue. Évidemment, avec le temps, le rendement nécessaire est décroissant et la probabilité de décès augmente. Le client a ainsi une vue d’ensemble de sa situation et peut alors prendre une décision éclairée.

Un exemple simplifié pour un homme non fumeur et une police avec un capital-décès de 1M$ est présenté dans le tableau ci-contre.

L’efficacité de l’assurance vie est plus grande lorsque la police est souscrite par une société par actions plutôt qu’individuellement. Le même constat s’applique lorsque la police est détenue personnellement par les assurés : le taux de rendement est plus élevé lorsque la police est souscrite sur deux têtes (conjointe dernier décès) que sur une seule.

Les fonds constitués en société

Les fonds constitués en société par actions, aussi appelés fonds « corpo » ou fonds « catégorie », permettent également au client de s’enrichir de façon importante. Un investisseur dans ce type de fonds devient un actionnaire d’une société par actions, et non le bénéficiaire d’une fiducie comme dans le cas des fonds constitués en fiducie.

Les investissements que la société par actions fait génèrent des intérêts, des dividendes et du gain en capital. Or, les dépenses d’exploitation (salaires des gestionnaires, frais de transactions, taxes, frais légaux…) de la société sont appliquées, en priorité, à l’encontre des revenus d’intérêt et de dividendes étrangers, traités comme du revenu d’intérêt.

L’objectif ultime de ces fonds est de ne créer aucun revenu imposable – donc de n’avoir aucune distribution de bénéfices à faire à ses actionnaires – et d’avoir une plus-value générée uniquement par la plus-value des titres que la société détient. De grosses pertes en capital ont été produites dans le passé, notamment en 2008-2009. Suivant la règle fiscale habituelle, ces pertes ont été appliquées à l’encontre des gains en capital des années ultérieures. Il en va de même chaque année ; les pertes en capital réduisent le gain en capital imposable.

Cependant, lorsque les rendements sont bons et que peu de pertes sont accumulées, il devient impossible pour les gestionnaires d’éliminer complètement les bénéfices de la société. Cette dernière peut alors « refiler » à l’investisseur son gain en capital en distribuant un dividende de gain en capital ou, pour les revenus d’intérêt notamment, payer son impôt et distribuer un dividende déterminé à ses actionnaires. La méthode exacte d’allocation des bénéfices aux différentes catégories d’actions demeure un élément propre à chaque gestionnaire.

Un investisseur peut donc ne jamais recevoir de revenu d’intérêt ni de dividende étranger dans ce type de fonds, car s’il y a un impôt à payer, c’est la société qui le paie.

Contrairement à l’assurance vie, plus le temps passe, plus l’avantage de ces derniers est important. Il faut toutefois être réaliste dans les projections. Comme je viens de le mentionner, à cause des bénéfices probables, il n’est plus réaliste de projeter un report total des revenus de placement. L’avantage de ce type de fonds se calcule souvent, à un âge de décès avancé, en millions de dollars, selon la fortune de votre client.

Revenons à Jean-Guy, 55 ans et nouveau retraité, qui possède une société de gestion dans laquelle il a investi 5 M$. De plus, il a 500 000 $ dans un REER. Sa rente de retraite du Régime de rentes du Québec lui versera 10 000$ dans 10 ans. Son coût de vie annuel est de 100 000 $, indexé à 2,1 % par année. Nous avons fait une simulation de l’avantage de détenir, pour sa société, des fonds constitués en société par rapport à des fonds constitués en fiducie.

Le rendement annuel est de 3,9 % dans les deux cas. Évidemment, l’hypothèse de rendement égal étant fondamentale, elle devrait être vérifiée. La différence se situe sur le plan de la ventilation du rendement. Pour les fonds en fiducie, elle est de 1,5 % en intérêt, 0,7 % en dividende et 1,7 % en gain en capital, dont 25 % est réalisé chaque année. Pour les fonds constitués en société, le taux de dividende est de 0,6 % par année et le gain en capital, entièrement reporté, est de 3,3 %.

Selon cette simulation, on constate donc que, 40 ans plus tard, soit quand Jean-Guy aura atteint 95 ans, sa succession héritera de 2,6M$ de plus grâce à la fiscalité des fonds corporatifs, soit presque autant que le montant de sa fortune actuelle après impôt…

L’avantage des fonds constitués en société est légèrement plus grand lorsque ces fonds sont détenus dans une société par actions que lorsqu’ils sont détenus personnellement ou dans une fiducie. Cela est dû à la mécanique fiscale inhérente aux sociétés par actions (CDC et autres). Toutefois, les mesures fédérales proposées en juillet 2017 relatives aux sociétés privées viennent réduire cet ava ntage.

Police contre les maladies graves

Une police d’assurance contre les maladies graves avec remboursement de primes qui est détenue en copropriété par un actionnaire et sa société peut très bien prendre la place, en partie, des revenus fixes d’un portefeuille.

La police est conjointement souscrite par l’actionnaire et sa société. Ils sont donc tous les deux titulaires de la police. La prime relative au risque de tomber malade est assumée par la société, alors que la prime relative au remboursement, souvent du même ordre de grandeur que la prime de base, est assumée par l’actionnaire.

Ce dernier peut réellement payer sa prime de sa poche ou se déclarer un dividende égal au montant de la prime payée pour lui, dans les faits, par la société. Même s’il est possible de déclarer un avantage imposable au lieu d’un dividende, fiscalement, le dividende est préférable à l’avantage imposable à cause du taux marginal d’impôt inférieur.

Si l’actionnaire tombe malade, une somme importante sera versée à la société et pourra être remise à l’actionnaire sous forme de dividende. S’il ne tombe pas malade, et que tout est en règle, le remboursement de primes se fera directement dans les poches de l’actionnaire sans incidence fiscale, générant ainsi un certain équivalent de rendement pour les sommes investies par la société. En effet, de l’argent sorti de la société entre dans les poches de l’actionnaire, libre d’impôt. Le rendement ainsi obtenu est nettement supérieur à celui des dépôts garantis qu’on trouve actuellement sur le marché.

Attention, toutefois, au fait que le contrat de copropriété ainsi que le libellé du contrat d’assurance soient adéquatement rédigés pour être « acceptés » par les autorités fiscales. Peu de ces contrats sont bien rédigés et encore moins d’assureurs sont prêts à soutenir leurs clients si jamais les autorités fiscales considéraient que cette technique n’est plus « acceptée » de leur part.

Revenus de placement bien placés

Le revenu étranger dans une société par actions devrait être éliminé, dans la mesure du possible. En effet, le revenu étranger dans une société peut être imposé jusqu’à 66 % si l’on tient compte de l’impôt de l’actionnaire combiné à celui de la société.

Ce taux astronomique est dû au fait que l’impôt en main remboursable au titre de dividendes (IMRTD) est inférieur à l’impôt de la Partie IV de la Loi de l’impôt sur le revenu.

Généralement, lorsqu’on fait des illustrations de l’IMRTD, on dit que la société paie de l’impôt à l’avance (impôt de la Partie IV) qui lui sera remboursé lorsqu’elle versera un dividende imposable à ses actionnaires. Pour les revenus canadiens, c’est vrai, mais pour les revenus étrangers, le montant du remboursement est inférieur à l’impôt payé et c’est ce qui fait grimper le taux d’imposition combiné. L’actionnaire doit donc éviter d’avoir des investissements lui rapportant des revenus étrangers dans sa société.

Si du revenu étranger est nécessaire dans la répartition d’actif du client, ce devrait être dans des comptes non enregistrés. De façon générale, les titres étrangers détenus dans un régime enregistré font l’objet d’un impôt dans leur pays d’origine et cet impôt ne peut être récupéré par le résident canadien. Il vaut mieux alors détenir les titres étrangers dans des comptes non enregistrés permettant de bénéficier d’un crédit pour impôt étranger plutôt que de les détenir dans un CELI.

La même remarque s’applique pour les REER et les fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR), à l’exception des revenus américains, car il existe une particularité dans la convention fiscale entre le Canada et les États-Unis qui exempte de taxation les revenus de placement des titres américains détenus dans les régimes de retraite (par extension les REER et FERR) canadiens.

Les revenus plus imposés, comme le revenu d’intérêt, devraient également faire partie des régimes enregistrés. De cette façon, les comptes non enregistrés bénéficieront davantage de rendements sous forme de gain en capital, moins imposé.

Optimisation des flux monétaires

Finalement, l’optimisation des flux monétaires, c’est-à-dire combien épargner et retirer dans chacun des comptes, peut rapporter gros en valeur successorale ajoutée. Malheureusement, ce genre d’optimisation n’est pas à la portée de tous. Il faut tout de même savoir que ça existe… et ce texte vous donne, à l’occasion, quelques résultats de simulations optimisées.

Par exemple, il faut savoir qu’une optimisation REER-CELI, dans le cas des personnes fortunées, n’apporte que très peu de valeur, comparativement à d’autres méthodes.

Le fait de réduire l’IMRTD à zéro chaque année est une condition presque sine qua non d’une telle optimisation dans le cas d’un actionnaire.

De plus, l’atteinte d’un certain seuil minimal de revenu imposable est souvent bénéfique. Autrement dit, le fait de décaisser des REER, des FERR ou de se verser un dividende imposable plus que nécessaire à court terme porte ses fruits à long terme, particulièrement lorsque les surplus sont réinvestis dans des fonds constitués en société.

Finalement, pour les clients désireux de l’envisager, l’utilisation possible des prestations du Supplément de revenu garanti (SRG) peut être très bénéfique, particulièrement avant 72 ans, alors qu’on retarderait la rente de retraite du RRQ et les retraits enregistrés REER ou FERR. •

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