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Depuis 2007, les conjoints ont la possibilité de fractionner leurs revenus de retraite au moment de faire leur déclaration de revenus. Cette mesure permet à certains couples d’épargner des milliers de dollars d’impôt en répartissant d’une façon plus optimale les revenus entre les conjoints.

Dans ce contexte, est-il encore pertinent de cotiser au REER de son conjoint, sachant que l’objectif est le même?

La réponse courte: oui.

Mais comme j’ai encore un peu de temps pour écrire mon texte, je vais nuancer ma réponse.

Tout d’abord, un REER au nom du conjoint permet davantage de flexibilité que le fractionnement des revenus à la retraite. En effet, un maximum de 50 % du retrait d’un REER ou d’un FERR peut être transféré sur la déclaration de revenu du conjoint. Peut-être que, dans certains cas, ce n’est pas suffisant. Une cotisation au REER du conjoint permet de «transférer» la totalité d’un revenu au conjoint, pas seulement la moitié.

Un à zéro pour le REER de conjoint.

Deuxièmement, le fractionnement n’est permis que pour les personnes de 65 ans et plus en général. À part les rentes des régimes de retraite (au fédéral) où cet âge n’est pas exigé, le fractionnement des revenus, de même que le crédit s’y rattachant, n’est disponible qu’aux personnes de 65 ans et plus qui fractionnent au bénéfice de leur conjoint. Le conjoint bénéficiant du fractionnement n’a toutefois pas à respecter ce critère.

Dans le cas d’un REER ou d’un FERR, il peut être avantageux de mieux répartir les revenus dans un couple sans avoir à attendre le 65e anniversaire du plus fortuné des conjoints.

Deux à zéro pour le REER de conjoint.

Il faut noter qu’une cotisation au REER du conjoint n’a pas les mêmes impacts qu’un simple fractionnement de revenu. L’argent déposé appartient au conjoint dès son dépôt. Pour les conjoints légaux (personnes mariées ou unies civilement), le fait de contribuer au REER du conjoint n’a aucune incidence sur la valeur partageable du patrimoine familial, en cas de divorce. Les cotisations, peu importe quel conjoint en est l’auteur, entrent dans le patrimoine familial et leur valeur accumulée doit être partagée moitié-moitié par les époux advenant un divorce.

C’est ici que les détracteurs du REER de conjoint s’appuient pour faire valoir leur principale critique: «Pour les conjoints de fait, les cotisations au REER du conjoint sont trop risquées pour les économies d’impôt possibles».

Bien sûr que si aucun document n’a été signé entre les conjoints de fait, une cotisation au REER du conjoint est carrément perdue advenant une séparation.

Mais il est facile, et surtout nécessaire, pour les conjoints de fait de faire entériner, par un acte notarié, les grandes lignes de ce que l’on entend faire en cas de séparation. Les conjoints n’ont qu’à s’entendre sur le fait que si des cotisations au REER de conjoint sont faites, elles devront être reconnues dans un calcul lors d’une séparation.

Dans la foulée de la réforme du droit de la famille, certains ajustements pourraient être apportés aux règles actuelles qui ne reconnaissent aucun droit aux conjoints de fait lors d’une séparation. Mais rien n’empêche des conjoints de fait, touchés ou non par les futures règles de bien se protéger en attendant.

Une autre critique que j’entends à l’occasion à propos des REER de conjoint est la fameuse règle des trois 31 décembre. Cette règle fait en sorte que si le conjoint bénéficiaire de la cotisation retire des sommes alors que des cotisations ont été faites au cours des trois dernières années, c’est le conjoint cotisant qui sera imposé sur les retraits, et non le conjoint ayant retiré l’argent. Évidemment, en cas de séparation, cette règle ne s’applique pas.

En fait, cette règle peut devenir un peu complexe lorsque les retraits effectués sont inférieurs aux cotisations faites au cours des trois dernières années. Mais lorsqu’ils sont supérieurs, c’est le total des cotisations faites par le conjoint cotisant qui n’ont pas encore «traversé» trois fois le 31 décembre qui sera imposé.

Par exemple, prenons un individu qui a cotisé les montants suivants dans le REER de son conjoint au cours des dernières années :

2015 : 3 000 $

2016 : 4 000 $

2017 : 5 000 $

2018 : 6 000 $

Si, en 2019, un retrait est effectué par le conjoint bénéficiaire, il faut savoir que les cotisations de 2015 et 2016 sont « protégées », c’est-à-dire imposées entre les mains du bénéficiaire et non du cotisant. Pourquoi ?

Parce qu’elles ont franchi les étapes des 31 décembre 2015 (pour celles de 2015), 2016, 2017 et 2018. Autrement dit, il n’y a que 11 000$ qui fasse l’objet des règles. Si le conjoint retire plus de 11 000$ de son compte, les premiers 11 000$ seront imposés entre les mains du cotisant (son conjoint) et l’excédent sera imposé entre ses propres mains.

On commence donc à imposer les dernières cotisations faites. Attention. Après avoir identifié les cotisations assujetties aux règles, ce ne sont pas les dernières qui sont les premières imposées.

Dans notre exemple, si un retrait inférieur à 11 000 $ était effectué, la situation se complexifie légèrement. Par exemple, si un retrait de 9 000 $ était fait, il doit rester encore 2 000 $ en « mauvaises » cotisations du conjoint (imposables dans les mains de celui qui a cotisé) après ce retrait. Ces 2 000 $ seront-ils affectés à l’année 2017 ou à l’année 2018 ?

Si les 2 000 $ restants étaient affectés à 2017, ils seraient imposables entre les mains du conjoint effectuant le retrait dès le 1er janvier 2020 (31 décembre 2017, 2018 et 2019). S’ils étaient affectés à l’année 2018, ils ne seraient imposables entre ses mains qu’à compter du 1er janvier 2021.

Eh oui. C’est 2018. La pire situation.

Après un retrait de 9 000 $, entièrement imposable dans les mains du conjoint ayant cotisé au REER, la situation des cotisations au REER du conjoint serait comme suit :

2015 : 3 000 $ (correctes)

2016 : 4 000 $ (correctes)

2017 : 0 $

2018 : 2 000 $ (imposables dans les mains du conjoint qui a cotisé)

Il faut aussi savoir que, pour essayer d’éviter les règles, le fait d’ouvrir des comptes REER dans plusieurs institutions financières ne sert à rien. Tout se passe au niveau du dossier fiscal des contribuables.

Il y a également le fait que si un FERR est souscrit avec ces cotisations des trois dernières années, les règles ne s’appliquent pas au retrait minimum. Même chose si une rente est achetée avec ces cotisations. Et n’oublions pas que si les règles fiscales venaient à changer, les cotisations appartiennent au conjoint, le fractionnement de revenu est ainsi assuré.

Bon. Finalement, c’est quoi le score ?

Personnellement, je trouve que c’est deux à un en faveur du REER de conjoint. Mais vous avez le droit de m’obstiner…

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