Parmi l’ensemble des modifications annoncées par le fédéral relativement à la fiscalité des sociétés par actions, le traitement du revenu passif est certainement la mesure qui a créé le plus d’incertitude. Cependant, l’élargissement de l’application de l’impôt sur le revenu fractionné (IRF), ou kiddie tax, en anglais, ne laisse pas sa place.
Cet impôt spécial frappe les personnes en affaires désirant transférer des revenus imposables aux membres de leur famille.
Un critère de raisonnabilité devra dorénavant s’appliquer pour qu’un contribuable puisse recevoir des sommes provenant, notamment, de l’exploitation d’une entreprise.
Les mots à retenir : « montant exclu »
Par défaut, tous les montants transférés d’une personne en affaires à un membre de sa famille feront l’objet de l’impôt spécial.
Cependant, si les sommes ainsi transférées se qualifient à titre de « montant exclu », aucune mesure particulière ne s’appliquera et le conjoint ou l’enfant majeur sera imposé sur ces sommes.
Le salaire faisant déjà l’objet de limites, ce sont les dividendes et les gains en capital qui sont visés avec les nouvelles règles.
Essentiellement, il y a quatre façons de voir une somme se qualifier à titre de « montant exclu » :
- Sommes provenant d’une « entreprise exclue »
- Sommes provenant d’ « actions exclues »
- Sommes considérées comme un « rendement exonéré »
- Sommes considérées comme un « rendement raisonnable »
Entreprise exclue
Si une personne participe ou a participé activement à l’exploitation d’une entreprise pendant un certain temps, le revenu tiré de cette dernière pourra se qualifier de montant exclu. Sinon, les sommes reçues seront frappées de l’impôt spécial. Un test de participation doit donc être réussi.
Pour réussir le test, une personne doit avoir 18 ans ou plus à la fin de l’année et doit avoir participé « activement de façon régulière, continue et importante » aux activités de l’entreprise :
- Soit au cours de l’année où le revenu est reçu
- Soit au cours de cinq années (pas nécessairement consécutives) dans le passé.
On voit ici que le degré de participation peut être interprété de diverses façons. On clarifie l’une des situations possibles en indiquant que si une personne a travaillé pendant au moins 20 heures par semaine, en moyenne, pendant les activités de l’entreprise – même saisonnières –, le critère est respecté.
Si ces critères de base ne sont pas respectés, ce sera une question de faits à savoir si la participation est ou a été suffisamment importante pour éviter l’impôt spécial.
Par exemple, si votre enfant de 23 ans a travaillé pendant au moins 20 heures par semaine de l’âge de 16 ans à l’âge de 22 ans pour votre entreprise, il est qualifié « à vie » pour recevoir des dividendes, des intérêts ou du gain en capital à la disposition de parts de cette entreprise sans être visé par la kiddie tax.
Actions exclues
Une autre façon de ne pas être touché du tout par l’impôt spécial est de toucher des revenus – ou un gain en capital à la suite de la vente – d’ « actions exclues ». Sauf en cas de décès, ce ne sera possible que pour les actionnaires âgés de 25 ans ou plus seulement à la fin d’une année.
Pour se qualifier d’ « actions exclues », les critères suivants devront notamment être respectés :
- la société n’est pas une société professionnelle, c’est-à-dire une société dont l’entreprise est exploitée par un comptable, un dentiste, un avocat, un médecin, un vétérinaire ou un chiropraticien;
- le particulier détient 10 % ou plus – en votes et en valeur – des actions du capital-actions de la société;
Par exemple, un conjoint détenant 20 % des actions votantes etparticipantes d’une société par actions pourra recevoir des dividendes sans limites et ne pas être assujetti à l’impôt spécial, même s’il n’est pas impliqué dans l’entreprise si l’ensemble des autres critères (non énumérés ici) sont respectés.
Les actions à dividendes discrétionnaires sans participation ne se qualifient donc plus au partage des revenus.
Rendement exonéré
Dans le cas des personnes de moins de 25 ans, si le rendement sur le capital investi de leur part n’est pas plus élevé que celui du taux prescrit (actuellement de 1 % par année), le montant de ce rendement sera un montant exclu.
Si le revenu est supérieur au rendement exonéré, l’excédent ne sera pas un montant exclu et fera partie du revenu fractionné.
Rendement raisonnable
Finalement, dans le cas de sommes provenant d’entreprises ou d’actions non exclues et qui ne seront pas considérées comme un rendement exonéré, les montants versés à une personne majeure devront respecter certaines limites pour être considérés « raisonnables » et ainsi ne pas être frappées par l’impôt spécial.
À l’instar du rendement exonéré, si une portion du revenu est considérée non raisonnable, ce sera l’excédent sur le montant considéré raisonnable qui sera assujetti et non le montant total.
Pour les personnes de moins de 25 ans, ce « rendement raisonnable » sera calculé uniquement sur le « capital indépendant » contribué par la personne, contrairement au rendement exonéré qui pourra être calculé sur d’autres types de contribution, par exemple sous forme de prêt.
Le « capital indépendant » d’un particulier est composé essentiellement de sommes gagnées (non empruntées) dans un autre contexte que celui d’une entreprise ayant un lien avec la personne.
Pour calculer le rendement raisonnable des personnes de 18 à 24 ans, les mêmes critères que ceux applicables aux personnes de 25 ans et plus seront pris en compte, la différence se situant au niveau du type de contribution. Ces critères sont notamment les suivants :
- la main-d’œuvre contribuée
- le capital contribué
- le risque assumé
D’autres critères pourront faire l’objet d’une analyse. Ici, c’est un peu une boîte de Pandore qui s’ouvre…
Une personne de 65 ans ou plus pourra fractionner ses « montants exclus » avec son conjoint, même si ce dernier est âgé de moins de 65 ans.
Ce seront donc aux tribunaux d’interpréter l’intention du législateur au cours des prochaines années… Si ça vous tente de « participer au combat », vous êtes les bienvenus…